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théâtre

Transhumance avignonnaise

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Encore dépourvue de grand festival estival dédié au spectacle vivant, la région exporte dix compagnies vers l'incontournable festival d'Avignon. Un dispositif qui a fait ses preuves.

Dans le grande bagarre pour la visibilité des oeuvres, devenue plus acharnée encore avec la multiplication des propositions de spectacles et la raréfaction des créneaux de diffusion au fil de la saison, la possibilité d'être présent au festival d'Avignon demeure un enjeu essentiel. La sélection 2023 de la transhumance régionale combine des vétérans de l'exercice et des nouveaux venus qui participent à la grand-messe du spectacle vivant pour la première fois. Initiée historiquement par la région Nord-Pas de Calais, première à l'époque à mettre en place un tel dispositif, l'opération permet d'alléger la charge financière des compagnies tout en mettant en lumière la création régionale.

 

Les six nouveaux venus de cette édition (Collectif lacavale, Cie Chaabane, Sama Cie, Cie Protéo, Cie Infra, Cie Le Compost) partent donc aux côtés d'équipes déjà venues dans la cité des papes (Cie Zapoï, Cie LaZlo, Diptyque Théâtre et Les Oyates/Marie Levavasseur), permettant – et c'est un effet collatéral bienvenu – de créer des liens entre des artistes venus des quatre coins de la région. Côté spectacles, les propositions sélectionnées par les équipes régionales misent sur la diversité de forme comme de ton. Avec Zèbres, la Cie Zapoï raconte, autour de la naissance d'un petit zèbre, les différences et singularités de chacun. À travers le deuil et la célébration de la vie, L'affolement des biches de la Cie Les Oyates questionne les rituels modernes quand la Cie Le Compost, dans La Trouée donne dans un seul en scène joliment orchestré la parole aux femmes des territoires ruraux. Avec Douchka, la Sama Cie évoque, derrière le faits divers de l'assassinat d'une personne transgenre, douze moments de vie et le miroir qu'ils tendent à la société quand Aveux du Diptyque Théâtre laisse place aux mots puissants d'une confession spontanée mais incomplète au cours d'une enquête policière. Au gré d'un dispositif épuré, la pièce donne brillamment à voir l'intensité du grignotement obsessionnel des mots qui ne sont pas dits ou pas entendus. Avec L'âge de nos pères, le Collectif lacavale poursuit sa démarche engagée à la recherche de l'origine de la violence des hommes et de la façon dont elle imprègne les histoires individuelles à l'heure d'évolutions sociales. Audrey Chapon et la Cie Lazlo choisissent de mettre en scène la conférence/confession de Macha une quadragénaire qui voit son univers basculer après un divorce mais sa vie continuer entre convictions qui s'étiolent, dignité préservée et regard sur soi sans concession. Sofiane Chalal et la Cie Chaabane portent avec Ma part d'ombre un premier spectacle qui joue d'une danse intime et forte sur l'apprivoisement de son corps tandis que Poussière de la Cie Infra raconte une renaissance après catastrophe dans le sillage d'une marionnette qui se reconstruit. Enfin, la Cie Protéo déploie dans La joie ! une représentation en forme de monologue entre philosophie et générosité pour partager un goût de l'échange et du contact devenus plus essentiels que jamais.

 

Si ce panorama ne peut malheureusement être découvert dans un seul et même lieu au moment du festival et ne représente qu'une infime portion de la création régionale, il a néanmoins le mérite d'exister et de permettre aux compagnies les moins aguerries de bénéficier d'une visibilité essentielle pour la diffusion de leurs projets. Il reste dommage que cette louable action régionale n'en profite pas pour valoriser également l'ensemble des compagnies qui font le voyage sur leurs propres deniers. La Région accompagne également près de 200 lycéens au sein du festival, des rencontres professionnelles et des temps d'échanges enrichissent le dispositif (du 11 au 13 juillet) et les Rencontres du spectacle vivant en Hauts-de-France connaitront en outre une deuxième édition en fin d'année (du 9 novembre au 9 décembre). La question de la mise en valeur en région des compagnies locales dans un temps fort partagé avec le public régional et l'enjeu de l'équilibre entre une création (très valorisée) et la diffusion (moins accompagnée) constituent cependant les angles morts de la démarche. Les Hauts-de-France demeurent cependant une terre de soutien à la culture, en ces temps de disette budgétaire pour le secteur, il faut aussi le saluer.

Publié le 28/06/2023 Auteur : Guillaume B.

Du 7 au 29 juillet au festival Off d'Avignon hautsdefrance.fr