Trente ans ont passé mais l'Empire, vaincu après la bataille d'Endor n'a pas disparu. Son héritier, le Nouvel Ordre, mène la vie dure à la République et la Résistance dont Leia Organa reste une figure de proue. Luke Skywalker manque cependant à l'appel, depuis qu'il s'est exilé après la trahison d'un de ses élèves, Kylo Ren...

 

2012 : George Lucas annonce la vente de Star Wars à Disney. Les projets alors dans les cartons partent aux oubliettes quand la firme aux grandes oreilles annonce vouloir relancer la saga au fil d'une nouvelle série de films. Si le battage médiatique et la dérive des produits sous licences (les supermarchés sont pleins de tout et n'importe quoi estampillé aux couleurs de la guerre stellaire) ont de quoi énerver, l'attente autour du film n'en demeure pas moins importante. Après avoir jeté aux oubliettes une grande partie des récits concernant l'après trilogie originale, Abrams et son scénariste Lawrence Kasdan (un vieux de la vieille), démarrent avec une galaxie vierge et de nombreux défis. Derrière un emballage visuel aussi soigné que celui de n'importe quel blockbuster actuel (et tout aussi dépourvu d'âme), le périple dessiné par Abrams joue le bon élève en puisant dans la mythologie originelle de l'univers de Lucas tout ce qui en faisait le charme, s'acquittant parfaitement d'un passage de relais entre les personnages référents et les nouveaux venus. Même les rebondissements singent ceux de la trilogie d'origine (on y traque un jedi perdu en cachant des indices dans un petit robot, un pilote hâbleur, un sage extraterrestre et un jeune qui se cherche, tous traqués par un vil suppôt du côté Obscur sur des planètes de sable, de glace et de forêts, on y trouve même une Etoile de la Mort et une cantina), sauf que le compte n'y est pas vraiment : dans l'ensemble, rien n'est neuf. Kylo Ren constitue un adversaire bien léger après la stature et la noirceur de Vador et, à force de chercher à plaire au plus grand nombre, Abrams et Disney font le pire choix : celui de ne pas en faire. Décalque évident de la première série, le film ne prend aucun risque visuel, ne fait preuve d'aucune ambition narrative en se montrant incapable de se détacher des références du mythe (les histoires de famille et de trahison sont encore le noeud du récit), sans doute pour mieux assurer le remplissage du tiroir-caisse et évidemment au détriment de la force pérenne du film. A l'écran, Ford et consorts font un boulot correct, et parmi la jeune génération, c'est sans doute Oscar Isaac qui s'en sort le mieux dans un rôle pas très éloigné du Solo d'Un nouvel espoir. Plus qu'une prolongation de la saga, ce Réveil de la Force constitue davantage le reboot déguisé d'une franchise avec laquelle Disney - tombé du côté obscur, rapide, facile et séduisant - compte encore se remplir les poches pendant des années (oui, le film annonce une suite). Abrams et consorts tuent le père (au propre comme au figuré) pour ne garder que les parties interchangeables de l'univers né en 1977 (n'importe qui peut porter le costume de Chewie ou animer le Faucon). C'est la limite du procédé prisonnier d'un impératif de rentabilité, bien éloigné de la démarche audacieuse, novatrice et originale qui fût celle de Lucas en 1977.